De la Côte d’Ivoire aux bords du lac
Le restaurant «Le Chalet» est situé tout là-haut, au-dessus du Léman. Depuis peu, il est dirigé par Jérôme Aké Béda.
Né en 1962 à Abidjan, la capitale de la Côte d’Ivoire, Jérôme Aké Béda a vu son parcours de vie prendre une tournure tout à fait normale: il débute sa scolarité auprès d’une école missionnaire française, puis après les études secondaires, il entre dans la première école hôtelière du pays, construite avec l’aide du Canada; poste de chef de rang puis de maître d’hôtel au «Wafou», un hôtel réputé sur les bords de la lagune d’Abidjan. Lors d’un séjour de vacances en France, le destin a voulu que Jérôme Aké Béda arrive en Suisse en 1990, où il perfectionne sa formation à l’École hôtelière de Glion, puis fait ses débuts au restaurant «Le Raisin» à Vevey (16 points au Gault&Millau) en 1992. Ensuite, le «Vieux Stand» à Lutry, «La Petite Grappe» à Lausanne et, en 1997, l’engagement en tant que maître d’hôtel et directeur de salle au restaurant «Le Château» chez Denis Martin à Vevey.
Ce dernier emploi aura été décisif pour la suite de sa carrière, car c’est auprès de Denis Martin que Jérôme Aké Béda a commencé à s’intéresser plus intensément au vin et à entraîner son goût. Après un passage au «Mirador Kempinski» au Mont-Pèlerin, où il fut demi-finaliste du meilleur sommelier romand en 2003 et en 2005 lors du Concours Ruinart, Jérôme Aké Béda est passé par l’«Auberge de l’Onde» de Saint-Saphorin, en tant que sous-directeur / maître d’hôtel, mais également en tant que sommelier maintes fois distingué. En 2015 finalement, le voici définitivement adoubé: le Gault&Millau le nomme «Sommelier de l’année»! Depuis le mois de mars 2024, Jérôme Aké Béda est le directeur du «Chalet» au Mont-Pèlerin.
Qu’est-ce qui vous a poussé à reprendre la direction du «Chalet»?
La volonté de relever le défi consistant à construire quelque chose en commun avec toute l’équipe et à amener un nouveau souffle dans la cuisine et l’organisation du service aura été un facteur déterminant de cette décision. L’orientation du «Chalet» doit permettre de réunir la clientèle existante de l’établissement et celle qui me suit et me reste fidèle. Il s’agit de clients qui exigent de la qualité et que nous voulons accueillir ici dans ce bout de paradis.
Ma vision du service est avant tout technique. Un exemple: lorsque le client commande une bouteille de vin blanc, il convient de servir ce dernier dans un seau. Nos hôtes doivent se sentir à l’aise chez nous et cela ne peut fonctionner que si les processus sont efficaces et bien rodés. Dans la gastronomie, ce sont de tels détails qui comptent.
Il en va de même pour la cuisine. Ici, j’attache beaucoup d’importance à l’emploi de produits locaux et suisses, de saison et d’excellente qualité, transformés avec un savoir-faire de tout premier plan. L’objectif est de produire une cuisine simple, bonne et sans fioritures que j’appelle cuisine bistronomique et démocratique, avec laquelle le client se sent comme à la maison et tout le monde trouve son compte, sans vouloir être élitaire.
L’un de vos objectifs était que la clientèle qui vous connaît de vos précédentes activités vous suive et monte également au «Chalet». Avez-vous atteint cet objectif?
Oui. Nous avons très vite vu que tous ceux qui me connaissaient venaient aussi au «Chalet» au Mont-Pèlerin. Il ne s’agit pas d’une clientèle «snob», mais tout de même d’une clientèle exigeante, habituée à la qualité. Nos clients veulent bénéficier d’une haute qualité en échange du prix payé. Cependant, il est également important que la clientèle existante du «Chalet» continue à se sentir bienvenue dans le cadre de la nouvelle orientation du restaurant et ne se sente surtout pas exclue. Il s’agit donc de placer le client et son bien-être au centre de tous nos efforts et de trouver le bon équilibre permettant à tout le monde d’apprécier au mieux le moment passé en notre compagnie.
Notre équipe, avec le chef de cuisine Anthony Leca, parviendra à relever ce défi, car elle répond déjà aux conditions nécessaires – une certaine ouverture d’esprit et la volonté d’intégrer de nouvelles choses au travail.
La Suisse était-elle le pays de votre choix lorsque vous avez décidé de partir à l’étranger faire vos expériences après votre formation?
Non, car je ne connaissais même pas l’existence de la Suisse. Nous avons été colonisés par la France et pour nous, l’Europe, c’est donc la France. À l’origine, je voulais rejoindre ma sœur à New York. Pendant des vacances à Sarlat, dans le Périgord, j’ai croisé par hasard mon ancien professeur de gestion d’entreprise. Il s’agissait d’un Français qui avait enseigné à l’École hôtelière d’Abidjan et gérait à Vevey le restaurant «Le Raisin». Quand je lui ai fait part de mes projets, il m’a conseillé de venir en Suisse et m’a fait une brève présentation du pays.
C’est ainsi que je suis venu avec un visa d’étudiant au Centre International de Glion et que j’ai fait mon stage au «Raisin». Puis plus tard, je me suis marié et suis devenu Suisse.
N’aviez-vous pas quelques appréhensions à vous installer dans un pays qui vous était étranger?
Non, je connaissais tout de même mon ancien professeur, je travaillais dans son restaurant et j’avais ainsi une sorte de famille. Le fait qu’il n’y ait pas de barrière linguistique a bien sûr également beaucoup aidé.
«Nos clients exigent de la qualité.»»
Aujourd’hui, on vous considère comme un grand expert en vins. Aviez-vous déjà eu l’occasion d’étudier de manière approfondie cette matière vaste et complexe en Côte d’Ivoire?
On me demande souvent si l’on cultive du vin en Afrique, respectivement en Côte d’Ivoire. La vigne pousse entre le 36e et le 56e parallèle. La Côte d’Ivoire se situe entre le 4e et le 10e parallèle. Le sud du pays se distingue par un climat équatorial et par la culture dominante du cacao, du café et de l’ananas. Les faits sont donc clairs: la Côte d’Ivoire n’est pas une région viticole et n’a pas de culture du vin. Dans les villages du pays, on boit non seulement de la bière, mais également un vin appelé Valpierre à l’époque. Ce dernier est vendu dans des bouteilles d’un litre fermées par un couvercle métallique. Je soupçonne que c’est un vin en poudre dissous dans de l’eau – un vrai «tord-boyaux».
Dans les restaurants huppés de la capitale Abidjan qui accueillent également des Français et où j’ai fait quelques stages au cours des années 1980, on servait au mieux du Beaujolais nouveau et du Georges Dubœuf.
Je ne savais donc rien du vin et de la diversité qui le caractérise. Ce n’est qu’en Suisse que j’ai découvert la dégustation de vin.
Trouvait-on à l’époque en Côte d’Ivoire du vin d’Afrique du Sud ou d’Algérie, par exemple?
Non, les Français avaient pratiquement un monopole et importaient les vins susmentionnés de métropole. Il en va tout différemment aujourd’hui. Si le commerce du vin est toujours encore contrôlé essentiellement par les Français et les Libanais, les supermarchés proposent également des vins du monde entier. À Abidjan, il existe même des vinothèques qui n’ont rien à envier à celles que l’on trouve à Zurich, par exemple. Les Ivoiriens ont adopté le vin et l’apprécient. On trouve des gens que l’on peut considérer comme des experts et on organise même des soirées dédiées au vin. Cette évolution est plutôt impressionnante.
En Afrique, on ne buvait guère de vin algérien ou marocain. Ce dernier était bien plus connu en Europe où on l’utilisait pour faire des mélanges. Grâce aux Français, on connaît désormais un peu mieux le vin marocain, mais ce dernier est déjà tellement imposé au Maroc qu’il devient hors de prix à l’importation.
Pouvez-vous vous imaginer travailler un jour en tant qu’expert en vins en Côte d’Ivoire?
Tout à fait. Il se passe énormément de choses dans le domaine du vin, l’évolution suit une courbe exponentielle. Hôtelier, expert ou consultant en vins – voilà qui me plairait. Je suis d’ailleurs déjà connu en Côte d’Ivoire grâce aux journaux et magazines – pas seulement pour le Prix Nestlé que j’ai obtenu en 1989. Remarquez que ce dernier n’avait aucun rapport avec le vin. Il s’agissait plutôt de créer un cocktail constitué de Nescafé Arabusta (arabica × robusta) et de lait en poudre Nido. J’ai mélangé ces ingrédients avec du Cointreau, du rhum et du jus d’ananas et j’ai appelé cela Le Nest-sweet cocktail – et gagné le 1er prix.
Votre épouse n’aurait pas d’objections?
Non, elle est Suissesse, mais elle aime la mer, les kilomètres de plage, le soleil… elle serait heureuse.
Y a-t-il des gens qui ont presque honte de reconnaître qu’ils ne connaissent rien au vin et qu’ils ont besoin de vos conseils?
Cela peut arriver, mais il ne faut surtout pas en avoir honte: c’est mon travail de conseiller les clients. En règle générale, ce sont surtout les experts en vins qui viennent me rendre visite pour obtenir quelques conseils leur permettant de découvrir de nouveaux vins. Je bénéficie de rapports privilégiés avec les vignerons importants en
Suisse et dans le monde entier. C’est pourquoi je propose également des vins très exclusifs qui attirent bien évidemment une clientèle qui s’enthousiasme pour le vin. Ces personnes font en fait un véritable voyage de découverte dans le monde passionnant du vin. Elles apprécient de pouvoir bénéficier des conseils de la part d’un sommelier expérimenté, même si elles sont tout à fait en mesure de prendre elles-mêmes de bonnes décisions. En effet, il se pourrait qu’elles négligent un aspect quelconque – il arrive régulièrement que même les connaisseurs aient tendance à s’en tenir à ce qu’ils ont déjà aimé une fois. Par ce biais, il peut arriver que l’on manque pas mal de choses!
«Ce n’est qu’en Suisse que j’ai découvert la dégustation de vin.»
Arrive-t-il que l’on remette en cause votre expertise – qu’une personne du coin vous dise qu’elle s’y connaît mieux dans ce domaine?
(Il rit) Oui, c’est arrivé quelquefois au début. J’ai appris à connaître et apprécier le vin chez Denis Martin à Vevey. Là-bas, je n’étais pas sommelier, mais maître d’hôtel, et j’étais responsable des salles. Lorsqu’on me présentait ensuite en tant que sommelier, par exemple lors de mariages, nombreux étaient les convives à être étonnés de me voir, car ils attendaient quelqu’un de la région. La méfiance initiale disparaissait toutefois rapidement lorsque les convives réalisaient que je leur avais recommandé un très bon vin et qu’ils passaient une très belle soirée. C’est plus tard au «Mirador Kempinski» que l’on a vraiment commencé à me prendre au sérieux, au moment où j’ai commencé à gagner des prix, ce qui paraissait ensuite dans quelques journaux et illustrés. Pour le «Mirador», j’ai remporté en 2004 le très réputé Prix Gosset Celebris de la meilleure carte de champagne; l’année d’avant, je me plaçais parmi les trois meilleurs sommeliers de Suisse romande 2003, puis en 2005. En 2015, le Gault&Millau m’a nommé «Sommelier suisse de l’année».
Vous avez écrit un livre…
… j’en ai même écrit trois: avec Pierre-Emmanuel Buss et le photographe Guillaume Perret, le «Guide des meilleurs vignerons de Suisse». Avec P.-E. Buss aussi, le best-seller «Les 99 chasselas à boire avant de mourir» publié en 2014, également aux Éditions Favre, et finalement, avec Jean-Charles Simon et le photographe Dominique Derisbourg, l’ouvrage très complet et désormais épuisé «Les 73 vins à boire pendant & après la Fête des Vignerons 2019». Dans ce dernier ouvrage, je présente non seulement les vins du Chablais et de Lavaux, mais aussi de nobles crus provenant de toutes les régions viticoles de Suisse. Le chorégraphe de la «Fête des Vignerons», Daniele Finzi Pasca, voulait que je commente ce qui se passait sur scène lors de la «Fête» et c’est dans ce contexte que j’ai rédigé ce livre.
Préparez-vous un nouveau projet de livre?
Non, mon projet actuel, c’est le «Chalet». Il demande toute mon attention. Nous venons de faire la première grande étape, mais nous sommes loin d’avoir atteint nos objectifs.
Le fait que l’on vous considère comme un spécialiste du Chasselas est-il dû au hasard? Le destin aurait par exemple pu vous mener au Tessin et vous seriez alors aujourd’hui un spécialiste du Merlot?
Oui, bien sûr. Je vis dans une région dans laquelle le Chasselas est un cépage qui se base sur une tradition séculaire. Il va donc de soi que l’on s’y intéresse tout particulièrement. Au XIIe siècle, les moines cisterciens et convers ont jeté leur dévolu sur les coteaux pentus de Dézaley, de Saint-Saphorin et d’Epesses. Ils ont appris à la population locale comment pratiquer la viticulture. J’ai été confronté à cette histoire tout à fait exceptionnelle dans tous les établissements dans lesquels j’ai travaillé, que ce soit à Vevey ou à Saint-Saphorin.
Qu’est-ce qui fait que ce cépage a un goût si particulier?
En fonction du terroir, le Chasselas a un goût tout à fait spécifique. C’est ce qui le rend si fascinant. Chaque grand cépage met également en valeur le sous-sol sur lequel il pousse. Dans le cas du Chasselas, le goût dépendra du fait qu’il pousse sur un terroir molassique, marneux ou encore un sous-sol de moraine. Le sous-sol de moraine est un reste du glacier du Rhône qui s’étendait ici à l’ère glaciaire. Par endroits, entre le Valais et Genève, le sol comporte beaucoup de cailloux. Ailleurs, il y a beaucoup de sable. C’est entre Chardonne, Saint-Saphorin, Epesses et Dézaley que le Chasselas développe le plus de subtilités: ce terroir est celui qui est le plus exposé au soleil. C’est aussi pour cette raison que l’on parle des trois soleils de Lavaux: le soleil lui-même, les cailloux du sol qui restituent la chaleur au système racinaire et le lac Léman qui réverbère les rayons du soleil sur les vignes pour leur donner de la chaleur supplémentaire. On peut donc dire que les raisins mûrissent trois fois en Lavaux, ce qui fait que le Chasselas d’ici se distingue clairement de tous les autres.
Un expert en vins peut donc bien distinguer ces différents terroirs de Chasselas?
Oui, du moins, c’était le cas avant. Ainsi, les vins provenant de La Côte avaient une petite note florale. Un Dézaley de Lavaux s’identifiait assez aisément grâce à sa richesse et sa maturité. Il suffisait de humer le vin pour pouvoir dire sur quel terroir il avait été cultivé. Aujourd’hui, la législation a changé et un vigneron n’est plus tenu d’utiliser qu’un certain pourcentage de vin AOC. Un exemple: une bouteille de Saint-Saphorin AOC contient 60% de vin issu de l’appellation Saint-Saphorin, mais peut contenir jusqu’à 40% issus d’une autre appellation. Par conséquent, il est devenu très difficile de reconnaître le terroir particulier qui a produit l’essentiel du vin en question.
Pour les grands crus, c’est un peu plus simple, mais là aussi, jusqu’à 10% du vin peuvent provenir d’une autre appellation.
Ne peut-on pas considérer la possibilité de faire des mélanges comme un avantage, une possibilité de créer de tout nouveaux arômes?
Il faut bien distinguer deux choses: soit on fait du vin, soit on le fabrique. Celui qui fait du vin respecte son terroir et met en valeur les conditions-cadres dictées par le climat, le sous-sol et le cépage. Dans ce cas, le vigneron est une sorte de chef d’orchestre qui accompagne ses musiciens – c’est-à-dire les éléments que la nature met à sa disposition.
Puis, il y a les fabricants de vin. Ils prennent des vins différents et les mélangent jusqu’à ce que le produit soit bon à boire et se vende. Ce n’est qu’une façon de faire du business. Il faut alors encore créer une belle étiquette sur laquelle on imprime par exemple Daniel SA et l’on vend les bouteilles dans les supermarchés.
Pas de frontières pour les amoureux de vin!
Votre carte des vins comporte-t-elle également du Chasselas du Vully, par exemple?
Oui! Ma philosophie est la suivante: pas de frontières pour les amoureux du vin! D’un autre côté, il est clair que nous mettons surtout l’accent sur les vins provenant de notre terroir, conformément à la devise que nous appliquons également en cuisine: la prise en compte des producteurs locaux. Nous mettons donc en avant l’appellation Chardonne parce que c’est l’endroit où nous nous trouvons. Cependant, toute la Suisse est représentée sur notre carte des vins: de Genève au Valais, des Grisons à Zurich. Quant aux vins étrangers, ils viennent de France, d’Italie et d’Espagne.
Peut-on déterminer un pourcentage des vignerons qui ne sont plus que des fabricants?
La Suisse peut se distinguer par ses vins de toute première qualité et ne devrait pas fabriquer de vins. Ce qui fonctionne avec les montres peut également fonctionner avec le vin. Je pense que la grande majorité des vignerons l’a bien compris et applique ce modèle. Ils sont la fierté de la Suisse. Cependant, il y a certainement moins de véritables artisans du vin et plus de fabricants de vins qu’avant: la vie est plus chère et chacun doit faire en sorte de pouvoir gagner sa vie.
La différence entre ces deux groupes s’exprime bien évidemment aussi par le prix. Une bouteille de vin blanc de Jacques Tatasciore peut coûter 250 francs et plus. Une bouteille de Gantenbein 400 ou 600 francs. Un Merlot Vinattieri de 150 à 200 francs dans les restaurants. Pourquoi? Parce que ces vins ont été élevés avec un maximum de soins et de méticulosité et n’ont rien à envier aux grands vins étrangers de référence.
Lorsqu’on dit que les vins suisses sont chers, cela s’explique parce qu’il existe encore ici un grand nombre d’artisans du vin. Si nous commençons à nous contenter de fabriquer du vin qui coûte 2 ou 3 euros, nous atteindrons vite le niveau de certains vins provenant d’Italie ou d’Espagne.
Quelle est la catégorie de prix d’entrée de votre carte des vins?
Là aussi, ce qui vaut pour la cuisine vaut également pour la carte des vins: elle est démocratique. Nous mettons l’accent sur les bouteilles d’un demi-litre dont certaines coûtent déjà moins de 30 francs. Si vous ne voulez que déguster un verre, vous êtes également le bienvenu à partir de 5,90 francs. Dans un hôtel 5 étoiles, vous payeriez sans autre 15 à 25 francs pour le même vin.
Les grands vins, quant à eux, ont bien sûr leur prix. Mais l’amateur de vins qui compare et connaît le prix d’un vin bien particulier constate immédiatement que les prix sont corrects.
Mentionnons que notre carte des vins a obtenu le nombre de points maximal décerné par Swiss Wine. Il s’agit d’une reconnaissance du fait que nous proposons un excellent choix de vins suisses.
Aux clients très exigeants à la recherche d’une qualité exceptionnelle, nous proposons la «Sélection pour les Gosiers d’Or»: des vins très rares, très difficiles à trouver.
Tous ces vins ont en commun le fait que je les ai tous dégustés et que je les ai sélectionnés avec le plus grand soin – une simple recommandation d’un vigneron ne me suffit pas.
J’ai vu qu’il existait également des bouteilles numérotées, par exemple 124/199.
es vins sont disponibles en exclusivité chez moi. Il s’agit de vins que j’élabore avec des vignerons sélectionnés. Par exemple la Syrah JAB, JAB pour Jérôme Aké Béda. J’accompagne l’ensemble du processus, je choisis le cépage, je déguste et je valide la vinification. De temps à autre, je dois aussi donner décharge au vigneron. En effet, si je souhaite par exemple renoncer au filtrage et à tout collage, je dois assumer la responsabilité d’éventuels dépôts, matières en suspens ou déviations organoleptiques.
Là aussi, je me considère comme un entrepreneur. Ce dernier doit prendre des risques s’il veut avancer. Si on se contente de faire ce que l’on sait faire et si l’on sait avec assurance que jamais rien ne ratera, on fait du surplace. Il en va de même pour les grands vignerons qui essaient de nouvelles choses. Ce sont eux, les fameux artisans du vin, par opposition aux fabricants de vin. Faire un grand vin, c’est prendre un risque assumé.
Quel est votre vin préféré?
J’adore le Chasselas et le Pinot noir, pour autant que ces vins aient été vinifiés avec beaucoup de précision.
«Le Chasselas se bonifie avec l’âge.»
Comment vous tenez-vous au courant?
Pour se tenir informé, il faut rendre visite aux vignerons. C’est ce que je fais pendant mes vacances qui me mènent en Suisse, en Italie, en France, en Espagne ou au Portugal. Par ailleurs, je lis un grand nombre de magazines spécialisés. Les dégustations au sein d’un cercle d’amis sont également très importantes. D’autres personnes peuvent en effet vous apprendre énormément et vous permettre de faire de nouvelles découvertes. Pour cela, bien évidemment, il faut faire preuve d’une certaine ouverture d’esprit. Quant à la visite des foires aux vins, elle permet de déguster en peu de temps un grand nombre de vins différents.
Quelle importance le Mondial du Chasselas a-t-il pour vous?
J’ai souvent fait partie du jury, mais dernièrement, je n’avais pas assez de temps pour cette activité. Désormais, je me concentre sur le «Chalet». Cependant, j’ai beaucoup de plaisir à déguster les vins primés et médaillés et à tenter de comprendre la décision des jurys.
Le changement climatique a-t-il un effet sur le rendement des vignes et sur la qualité du vin?
Oui, c’est un grand problème, surtout pour les vignes qui poussent dans des endroits fortement exposés au soleil. Dans ce cas, les vins ont tendance à être trop riches et trop lourds. Cela concerne surtout la vallée du Rhône ou les coteaux d’ici, où le soleil est toujours présent. Pour que les raisins ne mûrissent pas trop, il faut les récolter à temps – ou alors, on choisit de travailler avec de longues fermentations. La culture biodynamique, déjà très répandue, est une réponse au changement climatique. Elle permet de réduire le niveau de pH dans le sol et donc d’obtenir des vins plus digestes.
Il existe des Chasselas qui peuvent se garder dix ans, voire davantage. La règle d’or selon laquelle il convient de boire rapidement les vins blancs est-elle fausse?
Oui, c’est une erreur, une très grosse erreur! Le Chasselas se bonifie avec l’âge. Les vieux Chasselas sont fantastiques, mais il faut les trouver…
Jadis, le Chasselas n’avait pas très bonne réputation…
e crois que le Chasselas avait une telle réputation dans les années 1990. On a alors recommandé aux vignerons de se débarrasser de ce cépage et la Confédération a même versé des primes pour l’arrachage de ces vignes. On espérait que d’autres cépages permettraient d’obtenir une plus grande diversité et de mieux faire face à la concurrence de l’étranger. La surface de culture du Chasselas s’est ainsi réduite. Néanmoins, la Suisse occupe encore le troisième rang mondial derrière la Roumanie et la Hongrie. Dans ces pays-là, le Chasselas est cependant surtout utilisé pour les mélanges et la production de vins mousseux. C’est pourquoi la Suisse occupe le premier rang dans le domaine du Chasselas en bouteilles.
L’Alsace cultive également le Chasselas. Au niveau des quantités cependant, c’est anecdotique.
En Allemagne, la région du Bade-Wurtemberg (Markgräflerland) en produit également.
En Suisse, on le trouve le plus fréquemment en Suisse romande, mais il y en a également dans le canton de Bâle-Campagne – à Aesch – et au Tessin chez Gianfranco Chiesa à Rovio. Il appelle d’ailleurs son Chasselas Bianco di Pugerna.
Aujourd’hui, le Chasselas est une spécialité et souvent la grande fierté des vignerons!
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